SAINT JOHN CHRYSOSTOM

Monday, 26 July 2010

Acts 20 Abib s.Chrys.

http://jesusmarie.free.fr/jean_chrysostome_homelies_sur_les_actes_des_apotres_3.html
EXPLICATION PAR SAINT JEAN CHRYSOSTOME DU PASSAGE DES ACTES DES APOTRES POUR LE 20 ABIB (ACTES 27:42-28:6)

3. Le démon tente de nouveau d'empêcher l'accomplissement de la prophétie; déjà ils avaient décidé qu'un certain nombre de passagers. seraient mis, à mort: mais le centenier, voulant sauver Paul, ne le permit pas, tant il avait déjà d'attachement pour lui. " Les soldats étaient d'avis de tuer les prisonniers, de peur que quelqu'un d'eux, s'étant sauvé à la nage, ne s'enfuît. Mais le centenier les en empêcha parce qu'il voulait sauver Paul, et il commanda que ceux qui pouvaient nager se jetassent les premiers hors du vaisseau, et se sauvassent à terre, et que les autres se missent sur des planches et sur des pièces du vaisseau. Et ainsi ils gagnèrent tous la terre et se sauvèrent (42-44). Et s'étant ainsi (278) sauvés, ils reconnurent que l'île s'appelait Malte ". (Chap. XXVIII, 1.) Voyez-vous tout le bien qui est sorti de cette tempête? Si cette tempête est arrivée, ce n'est pas que la main de Dieu les ait abandonnés. Et comment, direz-vous, pouvaient-ils tenir ainsi à jeun, et ne prenant aucune nourriture ? Ils étaient sous l'empire d'une crainte si vive, qu'elle ne leur permettait pas de ressentir les atteintes de la faim, au moment même où ils allaient courir les plus grands dangers. Et la merveille est bien plus grande que, dans un tel moment, ils aient été sauvés du milieu des dangers, lui-même et tous les autres à cause de lui. " Et après avoir déployé la voile de l'artimon, ils tiraient vers le rivage à la faveur du vent". Il dit cela pour montrer toute la violence de la tempête par laquelle ils étaient ballottés. Car ordinairement ce n'est pas cette manoeuvre qu'ils exécutent. Et il a été dit plus haut (17) qu'ils abaissèrent les voiles (c'est ce qui a lieu, quand le veut est violent), pour se garantir ainsi contre, l'impétuosité du vent. Et c'est dans l'Adriatique, où il est si difficile de se sauver, qu'ils se trouvaient exposés à tous ces dangers. " Or nous étions dans le vaisseau deux cent soixante-seize personnes en tout ". Et comment l'auteur de ce récit sait-il qu'il y avait un tel nombre de gens naviguant ensemble? Il est probable qu'ils ont demandé pour quel motif tous ces hommes naviguaient, et qu'ils ont ainsi tout appris. Ils ne prenaient aucune nourriture, parce qu'ils ne songeaient pas à manger en présence d'un si affreux danger.

Et voyez comme Paul sait mettre à profit, pour enseigner sa doctrine, tons ces retards, tous ces contre-temps ! Et ce n'était pas un petit résultat que d'amener à la vraie foi tous ces hommes ! Mais reprenons de plus haut les paroles de notre texte. " Mais parce que beaucoup de temps s'était écoulé, et que la navigation devenait périlleuse, Paul leur donna cet avis : ales amis, je vois que la navigation s'en va devenir très-fâcheuse et pleine de périls ". Remarquez combien ce langage est exempt de tout orgueil :pour ne pas paraître, à leurs yeux, prophétiser, mais parler par simple conjecture. " Je vois ", dit-il; car ils ne l'eussent pas écouté, s'il. leur eût dit cela tout de suite, et comme devant certainement arriver...... Dans l'ordre naturel des choses, ils étaient destinés à périr, mais Dieu y a mis des empêchements. " Mais le centenier ajoutait plus de foi aux avis du pilote qu'à ce que disait Paul ". Pour qu'il apparaisse clairement que ce n'est pas par conjecture due Paul a dit tout cela, le pilote dit tout le contraire, lui qui connaît par expérience ces sortes de choses. " Et comme le port n'était pas propre pour hiverner ". Remarquez ceci : les lieux mêmes, ainsi qualifiés, nous apprennent que ce n'était, pas par conjecture que Paul parlait de la sorte : ceux qui paraissent avoir parlé par conjecture, ce sont les passagers, et il yen avait un. grand nombre de cet avis, qui conseillent au centenier de mettre. à la voile. Mais cela ne leur servit de rien ; car ils ne tardèrent pas à être battus par la tempête, et furent obligés de jeter à la mer une partie de leur chargement. C'est pour montrer cela, que le texte ajoute : " Et comme nous étions rudement battus par la tempête, nous jetâmes de nos propres mains les agrès du vaisseau ". La Providence permet que tout cela arrive, pour qu'à l'avenir ils cessât d'être incrédules. L'ouragan se lève, et d'épaisses ténèbres les enveloppent. Pour éviter le naufrage, ils jettent à la mer et le blé et tout le reste " ; car c'est ce que signifient ces mots : " Nous jetâmes les agrès du navire. Et parce qu'il y avait longtemps que personne n'avait mangé, Paul leur dit : Il fallait m'écouter, pour vous épargner une si grande perte ". Voyez-vous comme la tempête, et ces ténèbres qui les enveloppent, contribuent à les rendre plus dociles? Quant au centenier, il se montre docile à ce point qu'il laisse les soldats couper les câbles de l'esquif, pour le laisser périr dans les flots. Et ne soyez pas surpris que les matelots ne montrent que plus tard leurs dispositions à croire : cette espèce d'hommes est effrontée, et croit difficilement à ce qu'on lui dit.

Mais vous, considérez ici. la prudence de Paul. Il ne prend pas le ton du reproche, de la colère, mais se contente de leur dire doucement : " Il fallait ". Il savait, en effet, que celui qui prend ce ton au moment d'un grand désastre, est mal accueilli, mais qu'il n'en est pas ainsi lorsque le plus grand danger est passé. Il ne les presse donc que lorsqu'ils ont perdu tout espoir de se sauver, et alors même, leur annonce des choses utiles. " Quand la quatorzième nuit fut arrivée ", dit le texte, " pleins de crainte, ils attendaient avec (279) impatience que le jour vint ". Il s'exprime ainsi, de peur que quelqu'un ne vienne à dire qu'il n'était rien arrivé. Et leur frayeur montre lien ce qui s'était passé en effet. " Pleins de crainte", dit-il, " ils attendaient avec impatience que le jour vint ". La position est dangereuse; car c'est sur la mer Adriatique que tout cela arrive; et depuis longtemps ils n'avaient pas mangé. " Il y a aujourd'hui quatorze jours ", dit-il., " que vous êtes à jeun, et que vous. n'avez rien pris en attendant la fin de la tempête ". Ainsi, tout concourait à les mettre, pour ainsi dire, aux portes de la mort. C'est pourquoi il ajoute : " Je vous exhorte à prendre de la nourriture, car ce n'est qu'ainsi que vous pourrez vous sauver", c'est-à-dire, prenez de la nourriture pour ne pas mourir de faim. " Et ayant pris du pain ", dit le texte, " il rendit grâces à Dieu ".

4. Cette action de grâces pour ce qui vient de se passer non-seulement les fortifie, mais encore leur donne du courage. " Or, nous étions dans le vaisseau deux cent soixante-seize personnes en tout ". C'est de tout ce monde qu'il a dit : Il ne périra pas, d'entre a vous, une seule âme ". Cette prédiction qu'ils seront tous sauvés, ne peut partir que d'une âme qui est en possession d'une certitude pleine et entière. " Quand ils furent rassasiés, ils soulagèrent le vaisseau en jetant le blé dans la mer ". Avez-vous remarqué qu'ils ne croient Paul qu'en ce qui concerne le conseil qu'il leur a donné de prendre de la nourriture, et que déjà, ils s'en rapportaient tellement à Paul pour tout le reste, qu'ils jetaient le blé dans la mer. Voyez. comme ils se laissent aller, dans leurs actions, à des sentiments tout humains, sans. que Paul les en empêche. " Le jour étant venu, ils lâchèrent les attaches du gouvernail... Et les soldats étaient d'avis de tuer les prisonniers ". Ne pensez-vous pas qu'en cela encore ceux-ci auront été reconnaissants envers Paul? En effet, c'est à cause de lui que le centenier ne permit pas qu'on les tuât. Et ce qui me fait croire plue ces hommes étaient évidemment des scélérats, c'est qu'on se décide à les mettre à mort de préférence aux autres. Mais on n'en fit rien, parce qu'on en fut empêché par le centenier : les uns donc se sauvèrent à la nage, les autres sur des radeaux; de sorte qu'il n'y eut.pas un seul des passagers qui n'échappât à la mort, et que la prophétie reçut enfin son accomplissement, bien que sans éclat, quant à la durée du temps écoulé : en effet, ce n'était pas plusieurs années à l'avance que Paul avait prédit ces événements, mais il s'était contenté de suivre comme pas à pas la marche naturelle des choses. Tout ici dépassait les espérances purement humaines, et ce ne fut qu'au prix de leur, propre délivrance qu'ils.apprirent qui il était. On dira peut-être : mais pourquoi n'a-t-il pas sauvé aussi le navire?

Pour qu'ils sussent bien à quels dangers ils venaient d'échapper, et parce que rien n'arrivait.ici par l'effet d'un secours purement humain, ruais par la main de Dieu qui les a sauvés, bien qu'ils n'aient plus de navire. Ainsi les justes, dans le déchaînement même des tempêtes, au milieu des flots d'une mer en courroux, non-seulement ne souffrent aucun mal, mais encore ont le pouvoir de sauver ceux qui sont avec eux. Si ces prisonniers, après que le navire a été ballotté par les flots et a fait naufrage, ont été sauvés par Paul, songez combien on doit s'estimer heureux de posséder dans sa maison un saint homme ; car sur cette terre, bien des tempêtes tout autrement terribles que celles-là, se déchaînent sur nous; mais Dieu peut nous sauver, pourvu que nous écoutions les saints, comme firent ces prisonniers, pourvu que nous lassions ce qu'ils nous prescrivent. Et ils ne sont pas sauvés purement et simplement, mais encore ils ont porté avec eux la foi dans le monde. Bien qu'un saint soit enchaîné, il opère encore de plus grandes choses que ceux qui sont libres. Et remarquez que c'est ce qui arrive ici. Le centenier, tout libre qu'il était de ses mouvements, avait besoin de cet homme enchaîné; le pilote, si expérimenté dans son art, avait besoin de celui qui n'entendait rien à cet art, et qui, en réalité, était en ce moment le vrai pilote.

En effet, ce n'était pas ce navire-là, mais l'Eglise universelle qu'il gouvernait, non à l'aide d'un. art tout humain, mais en vertu d'une science toute spirituelle , après avoir appris ce gouvernement de Celui qui est aussi le maître de la mer. Pour ce navire, il y a aussi bien des écueils, bien des flots soulevés, bien des souffles de malice. a Ce n'est que combats au dehors, que frayeurs au dedans ". De sorte que le véritable pilote, c'était lui. (280) Jetez un coup d'oeil sur l'ensemble de la vie humaine. Tantôt nous sommes l'objet de toute la bienveillance de nos semblables; tantôt nous sommes ballottés. au gré de leurs caprices, et souvent aussi nous tombons dans mille maux par nos propres folies ou par nos propres négligences, mais bien plus encore parce que nous n'écoutons pas Paul, et que nous nous hâtons d'aller là où il ne veut pas que nous allions. En effet, maintenant encore il est embarqué avec nous, mais sans être enchaîné comme il l'était alors ; maintenant encore il exhorte ceux qui naviguent sur la mer de ce monde, et leur dit : " Prenez garde à vous-mêmes.:. " car je sais qu'après mon départ, il entrera parmi vous des loups ravissants ". Et encore : " Dans les derniers jours, il viendra des temps fâcheux, et il y aura des hommes amoureux d'eux-mêmes, avares, glorieux ": Et ce vent-là est bien le plus dangereux pour ceux qui traversent les flots agités de cette vie.

5. Restons donc où il nous ordonne de rester, dans la foi, qui est pour nous le port le plus sûr; écoutons-le plutôt que ce pilote qui est en nous, c'est-à-dire, notre raison. Ne faisons pas ce que nous suggère ce pilote, faisons ce que Paul nous recommande : il a déjà traversé sans péril bien d'autres tempêtes. N'attendons pas l'expérience pour nous instruire, mais avant toute expérience, sachons éviter l'outrage et la ruine. Ecoutons-le nous disant : " Ceux qui veulent devenir riches tombent dans la tentation ". Ajoutons foi à ces paroles, sachant ce qui est arrivé à ceux qui n'ont pas voulu- l'écouter. Et, dans un autre endroit, il explique d'où viennent les naufrages. " Quelques-uns ont fait naufrage, en perdant la foi ". Persistez donc dans les doctrines qui nous ont été enseignées, et auxquelles vous avez cru. Ajoutons foi aux paroles de Paul, et nous serons délivrés de tous les périls, alors même que nous serions au plus fort de la tempête, que nous serions restés quatorze jours à jeun, que tout espoir de salut serait perdu, que nous serions plongés dans les plus épaisses ténèbres. Considérons l'univers entier comme un navire sur lequel nous voguons, et où nous avons pour compagnons de notre traversée des méchants, des hommes perdus dé vices, les uns qui nous commandent, les autres qui nous gardent, et, à côté de quelques justes, comme Paul, des prisonniers, c'est-à-dire, des hommes qui sont dans les liens du péché. Si nous croyons à la parole de Paul, bien qu'enchaînés, nous ne périrons pas, mais, tout au contraire, nous . serons délivrés de nos chaînes. Car, à nous. aussi, Dieu pardonnera en sa faveur. Ne pensez-vous pas que lés péchés et les passions sont de bien lourdes chaînes? C'est sur l'homme tout entier, et non sur ses mains seulement, qu'elles s'appesantissent. En effet, dites-moi : lorsqu'un homme, qui a acquis de grandes richesses, ne les emploie ni ne les dépense, mais les garde dans ses coffres, n'est-il pas chargé, par sa parcimonie même, de chaînes plus dures que quelque prisonnier que ce puisse être? De même, quand un homme s'abandonne aux caprices du sort, ne se. charge-t-il pas d'une autre espèce de chaînes? Et lorsqu'il se livre à des pratiques superstitieuses ; lorsqu'il consulte les présages; ou bien, lorsqu'il est la proie de quelque passion insensée ou de l'amour, ne trouve-t-il pas dans tout cela des chaînes plus lourdes que toutes celles qu'on pourrait imaginer? Et qui pourra briser toutes ces chaînes? Evidemment, nous ne pouvons en être délivrés que par l'aide de Dieu. Et une seule de ces choses suffit pour nous mettre en danger : mais si nous.nous trouvons à la fois enchaînés, et ballottés par la tempête, jugez du danger dans lequel nous sommes. La faim, la tempêté, la méchanceté de nos guides, un contre-temps, chacun de ces maux pris à part ne suffit-il pas pour nous perdre? Eh bien, c'est à tous ces maux réunis que Paul résista glorieusement. Or, il en est de même aujourd'hui : retenons les saints auprès de nous, et il n'y aura pas de tempête. Que dis-je ? S'il s'élève une tempête, peu après un grand calme, une grande sérénité lui succéderont, et, par suite, nous serons délivrés de tout danger, comme cette veuve qui avait donné l'hospitalité à un saint, par l'intercession duquel son fils ressuscité fut rendu aux embrassements de sa mère. Là où les saints mettent les pieds, il n'arrivera, rien de fâcheux; ou s'il arrive quelque chose de fâcheux, cela n'arrive que pour nous éprouver et procurer la plus grande gloire de Dieu. Faites en sorte que le pavé de vos demeures soit souvent foulé par de tels pieds, et il ne le sera pas par ceux du démon. Et il est bien juste qu'il en soit ainsi. Un suave parfum qui embaume l'air, ne laisse pas de place aux (281) odeurs désagréables : dé même là où l'on respire le parfum de la sainteté, le démon expire comme suffoqué par ces exhalaisons mortelles pour lui, tandis que ce même parfum , se répandant partout, réjouit tous ceux qui ont le bonheur de vivre avec ce saint, et dilate leurs âmes. Là où croissent les ronces et les épines, là pullulent de hideuses bêtes; mais il ne.. croit ni ronces; ni épines, là où s'exerce l'hospitalité; car l'esprit de miséricorde et de charité, en y pénétrant , les retranche et les fait disparaître mieux que ne pourrait le faire la faux la plus tranchante ou le feu le plus violent. Ne craignez rien : de même que les renards respectent les lions, de même tout respecte l'empreinte des pas des saints. " Le juste ", dit l'Ecriture, " a toute l'assurance d'un lion ". Introduisons ces lions dans nos demeures, et toutes ces bêtes seront mises en fuite, sans que ceux-ci aient besoin de pousser de grands cris; il leur suffira de parler. Car le rugissement du lion a moins de pouvoir pour mettre en fuite les bêtes sauvages, que la prière du juste pour mettre en fuite les démons; il n'a qu'à parler, ils tremblent. Mais, me direz-vous, où sont aujourd'hui de tels hommes? — Partout, si nous avons la foi , si nous cherchons, et si, pour trouver, nous n'épargnons pas nos peines. — Mais, dites-moi, où donc avez-vous cherché? Quand vous êtes-vous jamais occupé de ce soin? Si vous ne cherchez pas, ne soyez pas surpris que vous ne trouviez paves. " Celui qui cherche , trouve ", et non celui qui ne cherche.pas. Allez entendre ceux qui vivent dans la solitude; il y en a dans toutes les parties de l'univers. Si vous ne pouvez pas recevoir ce saint dans votre maison, allez le trouver, liez-vous avec lui; ou, du moins, approchez-vous de sa demeure, pour que vous puissiez réussir à le voir et obtenir sa bénédiction. Car elle est puissante la bénédiction qui nous vient des saints : ne négligeons rien pour l'obtenir, afin qu'à l'aide de leurs prières, nous puissions jouir de la miséricorde de ce Dieu, qui fait ta. force des. saints , par la grâce et la charité de son Fils unique, avec lequel, gloire; puissance , honneur, au Père et, au Saint-Esprit, maintenant et toujours, dans les siècles dès siècles. Ainsi soit-il.












HOMÉLIE LIV. ET LES BARBARES NOUS TRAITÈRENT AVEC BEAUCOUP DE BONTÉ, CAR ILS NOUS REÇURENT TOUS CHEZ EUX ET ILS ALLUMÈRENT UN GRAND FEU A CAUSÉ DE LA PLUIE ET DU FROID QU'IL FAISAIT, ALORS PAUL AYANT RAMASSÉ QUELQUES SARMENTS, ET LES AYANT MIS AU FEU, UNE VIPÈRE, QUE LA CHALEUR EN FIT SORTIR, LE PRIT A LA MAIN. (CHAP. XXVIII, VERS. 1-3, JUSQU'AU VERS. 16.)
ANALYSE. 1 et 2. Paul dans l'île de Malte, son arrivée à Rome. — 3. Les tentations procurent de grands avantages. — Utilité ces adversités. .

1. Le texte nous explique de quelle manière les barbares leur témoignèrent leur humanité. " Ils nous reçurent tous chez eux ", dit-il, " et allumèrent un grand feu ". Comme il était inutile qu'ils cherchassent à se sauver par un tel froid qui les aurait fait périr, ils allumèrent un grand feu. Paul ensuite jette dans le feu les sarments qu'il a ramassés. (282) Voyez-le toujours agissant, et ne cherchant jamais à faire des miracles sans raison et sans but, mais seulement par.nécessité. Et au moment même où la tempête s'élevait, ce n'était pas sans avoir des raisons qu'il prophétisait. Ici donc il se contente d'alimenter le feu, sans chercher par cela à se donner la. moindre importance, mais uniquement pour que ses compagnons de voyage puissent se réchauffer et se remettre par. ce moyen. Et en ce moment même une vipère que la chaleur avait fait sortir, le prit à la main. " Et quand les barbares virent cette bête qui pendait à sa main, ils s'entre-disaient : Cet homme, c'est sans doute quelque meurtrier, puisque, après avoir été sauvé de la mer; la vengeance divine le poursuit encore et ne veut pas le laisser vivre (4) ". Et ce n'est pas sans raison que la Providence permet qu'ils soient témoins de cet- accident , et qu'ils en parlent en ces termes, afin que, lorsque le miracle sera arrivé, ils ne refusent pas d'y croire.. Et voyez comme le sens commun et la raison naturelle se montrent, dans toute leur rectitude, même chez les barbares; voyez tout ce. qu'il y a d'honnêteté dans leurs sentiments, et de réserve dans leurs jugements. Et ceux-ci sont les premiers à voir, afin qu'ils en admirent davantage ce qui va arriver. " Mais Paul ayant secoué la vipère.dans le feu, n'en reçut aucun mal. Les barbares s'attendaient à ce que sa main s'enflerait , ou qu'il tomberait mort tout d'un coup : mais après avoir attendu longtemps., lorsqu'ils .virent qu'il ne lui en arrivait aucun mal, ils changèrent de sentiment, et dirent que c'était un Dieu (5-6) ". Ceux qui s'attendaient à le voir tomber mort, voyant qu'il n'éprouvait aucun mal , disent maintenant : c'est un Dieu. Et voilà que de nouveau il est comblé d'honneurs par ces hommes, comme il le fut par cette multitude de la Lycaonie. " Or, il y avait en cet endroit un nommé Publius, le premier de cette île, qui nous reçut, et exerça, avec une grande bonté , l'hospitalité envers nous pendant trois jours (7) " Voilà un nouveau Publius, hospitalier comme le premier, vivant dans l'opulence. Celui-ci, qui ne savait rien de la religion du Christ, mais que le seul spectacle de leurs malheurs disposait à la pitié, les reçut et leur prodigua ses soins. " Or, il se rencontra que le père de Publius était malade de fièvre et de dysenterie ; Paul l'alla voir, et ayant fait sa prière, il lui imposa les mains et le guérit (8) ". Il méritait bien d'obtenir de Paul ce service, et celui-ci , par un échange de bons procédés, guérit son père. " Après ce miracle, tous ceux de l'île qui étaient malades, vinrent à lui, et ils furent guéris. Ils nous rendirent ainsi de grands honneurs, et ils nous pourvurent de tout ce qui était nécessaire pour notre voyage (9-10) ". C'est-à-dire, tout ce qui était nécessaire; soit à. nous, soit aux autres qui étaient avec nous : considérez qu'à cause de Paul , après avoir échappé à la tempête, ils ne restent pas privés de soins, et sont même entourés de tous les égards d'une généreuse hospitalité; car ils furent nourris en cet endroit pendant trois mois. Ecoutez de quelle manière la suite du texte établit qu'ils sont demeurés là pendant tout ce temps.

" Au bout de trois mois, nous nous embarquâmes sur un vaisseau d'Alexandrie, qui avait passé l'hiver dans l'île , et qui portait pour enseigne : Castor et Pollux. Nous abordâmes à Syracuse où nous restâmes trois jours. De là,, en côtoyant la Sicile, nous vînmes à Rhégium, et un jour après, le vent du midi s'étant levé , nous arrivâmes en deux jours à Pouzzoles , où nous trouvâmes des frères qui nous prièrent de demeurer sept jours auprès d'eux, et ensuite nous prîmes le chemin de Rome. Lorsque les frères de Rome eurent appris des nouvelles da notre arrivée , ils.vinrent au-devant de nous jusqu'au lieu appelé le marché d'Appius et les Trois Hôtelleries. Et Paul les ayant vus, rendit grâces à Dieu , et fut rempli d'une nouvelle confiance (11-15) ". Voyez comme tout cela arrive à cause de Paul, et pour amener à la foi les prisonniers, les soldats, le centenier. Car alors même qu'ils eussent été dé pierre, ils ne pouvaient manquer de se faire une haute idée de lui , par les conseils qu'il leur avait donnés , par les prophéties qu'il avait fait entendre , par les miracles qu'il avait opérés, et enfin par ses bienfaits: car c'était à lui qu'ils devaient d'avoir été nourris si longtemps. Remarquez de quelle manière, quand le jugement est droit , et qu'aucune passion ne le trouble , il accueille les pensées droites et sages. La prédication chrétienne avait déjà pénétré en Sicile, elle était arrivée jusqu'à Pouzzoles, puisqu'ils y trouvent un certain nombre de frères auprès desquels ils demeurent. Là, (283) d'autres que la renommée avait attirés, vinrent au-devant d'eux ; l'affection qui unissait entre eux tous ces frères était si vive , qu'ils ne furent pas troublés dans leur résolution par cette pensée que Paul était dans les fers, mais se hâtèrent de venir au-devant de lui. — Avez-vous remarqué en même temps comme l'âme , de Paul , en cette circonstance , s'ouvre à des sentiments tout humains. Les ayant vus , dit notre texte, il fut rempli d'une nouvelle confiance. Bien qu'il eût déjà opéré tant de prodiges, il n'en puisa pas moins , dans cette vue de ses frères, de nouvelles forces, un nouveau Courage. Et cela nous apprend que , comme celle des autres hommes, son âme s'abandonnait tantôt au découragement, tantôt à l’espérance. " Quand nous fûmes arrivés à Rome, il fut permis à Paul de demeurer où il voudrait avec un soldat qui le gardait (16) ". C'est une bien forte preuve qu'il était l'objet de l'admiration publique : déjà on ne le mettait plus sur le même rang,que les autres prisonniers. " Or il arriva que. trois jours après, Paul pria les principaux d'entre les Juifs de le venir trouver ". Trois jours après , c'est-à-dire, avant qu'on eût eu le temps de semer des préventions dans leurs esprits. Qu'y avait-il de commun entré eux et lui? Ce n'étaient pas ces Juifs qui devaient l'accuser. — Mais Paul néglige cette circonstance : il veut leur enseigner sa doctrine dès ce moment.

2. Les Juifs donc qui avaient été témoins de tant de prodiges , le persécutaient, le chassaient; et les barbares, qui n'avaient rien vu, étaient touchés de compassion au seul spectacle de ses malheurs. " Cet homme ", disent-ils, " est sans aucun doute quelque meurtrier ". ils ne disent pas simplement: " C'est un meurtrier " ; mais : " sans aucun doute " , c’est-à-dire, qu'à leurs yeux la chose est certaine. " Et la vengeance divine", ajoutent-ils, " le Poursuit "encore et ne veut pas le laisser vivre ". En parlant ainsi, ils montraient qu'ils tenaient grand compte de la Providence, de sorte que les barbares étaient beaucoup plus philosophes que les philosophes mêmes. Ceux-ci , en effet , croient devoir retrancher ce monde sublunaire de l'ensemble des êtres auxquels s'étend l'action de la Providence ; ceux-là, au contraire, croient que Dieu est présent partout, et que l'on a beau se soustraire à son action, on finit toujours par se retrouver sous sa main puissante. Et voyez que non-seulement ils ne

se permettent absolument rien contre Paul, mais encore qu'ils le respectent, touchés de ses malheurs. Et on ne lée voit pas publier partout ce qu'ils pensent sur son compte; c'est en se parlant entre eux qu'ils disent: " Cet homme est. sans doute quelque meurtrier ", et les chaînes dont ils le voyaient chargé, ainsi que ses compagnons, éveillaient naturellement ce soupçon dans leur esprit. Qu'ils rougissent ceux qui disent : Ne faites pas du bien à ceux qui sont en prison. —. Que cette conduite des barbares les fasse rougir: ces barbares ne savaient pas qui étaient cep hommes, mais il leur a suffi d'apprendre, au seul spectacle de leurs infortunes, qu'ils étaient des hommes, et à l'instant même ils les ont accueillis avec humanité: " Après avoir attendu longtemps", c'est-à-dire, que pendant longtemps ils s'attendaient à ce que Paul mourrait. Mais lui secoua la vipère dans le feu , et leur montra sa main qui n'avait reçu aucun mal. A cette vue, ils furent comme frappés de stupeur et d'étonnement. Et ce prodige ne fut pas opéré à leurs yeux d'une manière soudaine; ils attendirent quelque temps avant de l'apercevoir, de manière que l'imagination n'était ici pour rien, et qu'il n'y avait ni supercherie, ni surprise. " Il y avait en cet endroit des terres qui appartenaient à un nommé Publius , le premier de cette île , qui nous reçut fort humainement, et exerça envers nous l'hospitalité ". Expressions bien justes , car il n'appartient qu'à un homme bon et généreux de donner l'hospitalité à deux cent soixante et dix personnes. Mais considérez les grands profits que donne l'hospitalité ! Ce n'est pas par nécessité, ce n'est pas malgré lui, mais parce qu'il pense y trouver quelque avantage , qu'il leur donne l’hospitalité pendant trois jours : c'est donc à bon droit qu'il reçoit la récompense de tant de générosité, récompense qui passe de beaucoup tout ce qu'il a fait. En effet,. Paul commence par guérir son père de la dysenterie à laquelle il était sur le point de succomber, et non-seulement son père, mais encore beaucoup d'autres malades qui le dédommagent de ses soins, en lui prodiguant les témoignages de respect et les provisions au moment de son départ. " Ils nous rendirent de grands honneurs, et ils nous pourvurent de tout ce qui nous était nécessaire pour notre voyage ". Ce n'est pas que Paul reçoive tout cela comme un salaire loin de nous cette idée ! Mais ainsi (284) s'accomplissent ces paroles de l'Ecriture : " L'ouvrier mérite de recevoir sa nourriture". (Matth. X, 10) Or, il est manifeste que ceux qui l'accueillirent ainsi durent recevoir de lui la parole de l’Évangile; il ne se serait pas écoulé trois mois dans ces entretiens, s’ils n'avaient cru et produit de dignes fruits de leur foi. Et l'on peut induire de là que le nombre de ceux qui crurent fut considérable.

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